Le vrai poids écologique d'un email

Entre mythe et réalité : La véritable empreinte carbone d'un e-mail

La loi AGEC (Anti Gaspillage pour une Economie Circulaire) a été votée en 2020, mais sa mise en application est toujours en cours. En effet, le volet tickets de caisse entrera en vigueur au premier Janvier 2023, avec la suppression de l’impression systématique des tickets de caisse.

L’association des consommateurs Que Choisir a levé des doutes sur cette loi en indiquant que les clients avaient besoin de leurs tickets de caisse et que l’envoi par email était plus polluant qu’une impression. D’une part, la loi n’interdit pas l’impression, mais interdit l’impression systématique (chaque client qui le demande pourra avoir son ticket papier), mais d’autre part, le ticket par email n’est pas plus polluant qu’un ticket papier. Déconstruction d’un mythe par calcul dans la suite de cet article.

1/ Envoyer un email : Quel bilan carbone ?

Le calcul n’est pas simple, car il dépend de nombreux paramètres. Longueur du message, images, mise en forme, ajout d’une signature illustrée, poids des pièces jointes, temps de rédaction et lecture, etc. Cependant, il existe des chiffres qui circulent sur internet, et nous allons les détailler.

a/ Le mythe

Jusqu’en 2022, c’est l’ADEME (Agence de la transition écologique) qui proposait une évaluation de l’équivalent carbone d’un email. Bien que largement dépassée, cette évaluation est très souvent reprise/

1 mail simple émet 4 gCO2e.

1 mail avec pièce jointe émet 35 gCO2e, soit près de 10 fois plus !

1 spam émet 0,3 gCO2e.

Enfin, l’origine de ces calculs n’est pas claire, et leur détail n’est pas explicité même si l’ADEME cite un rapport de 2014 pour justifier ce chiffre.

b/ La réalité

En 2022, les calculs ont été mis à jour grâce à Basile Fighiera, consultant-formateur en stratégie bas-carbone et sobriété numérique. Voici son analyse pour Sami :

“L’impact carbone d’un mail est extrêmement variable en fonction des usages et de la configuration dans laquelle le mail est rédigé par l’émetteur et lu par les destinataires. Depuis quel type d’appareil le mail est envoyé ? A combien de personnes ? Avec ou sans pièce jointe ? Autant de paramètres qui font varier l’impact carbone de ce fameux email.


Nous sommes bien loin des 35 gCO2e. Les sources utilisées pour le calcul sont disponibles en fin de l’article.

c/ Détails

Pour l’exemple, voici la décomposition du coût d’un email de 1Mo depuis un ordinateur avec le wifi :

 

Nous constatons que le transport des données et leur stockage ne représentent qu’un petit pourcent du total. Nous remarquons aussi que c’est la fabrication des ordinateurs d’envoi et de réception qui coûtent le plus cher avec 92% du total…

2/ Ticket par email versus ticket de caisse papier

On considère qu’entre la production, le transport et l’utilisation, un ticket de caisse équivaut à 2,5 gCO2e.

Or, pour un ticket de caisse par email, avec une pièce jointe moyenne de quelques kilo octets, un ticket de caisse envoyé par email équivaut à environ 1 gCO2e.

Mais contrairement au papier, il n’est pas toxique pour l’homme (bisphénol A et autres dérivés). 

Enfin, et c’est le point le plus important, réduire la note CO2e d’un ticket de caisse par email est à notre portée : il suffit de garder ses ordinateurs et téléphones plus longtemps !

Conclusion

Les mythes ont la peau dure et aujourd’hui encore des voix s’élèvent contre la dématérialisation pour des raisons écologiques. Les petits gestes peuvent effectivement faire la différence : Demander votre ticket par email et éviter de changer son ordinateur ou son téléphone lorsqu’ils sont encore fonctionnels.

Enfin, ces sujets font vendre et permettent d’éviter les vrais débats. A titre de comparaison, un AR Paris New York coûte une tonne de CO2e, soit 1 million de tickets par email.



Les sources utilisées pour le chiffrage :

 Pour la partie équipements numériques

- Base Carbone de l’ADEM

Pour la partie réseaux

- « The carbon footprint of streaming video: fact-checking the headlines » Agence Internationale de l’Energie / Georges Kamiya (2020)

- « Empreinte environnementale du numérique mondial », GreenIT.fr (2019)

Pour la partie stockage

- «  New perspectives on internet electricity use in 2030 » Anders S.G. Andrae (2020)

- « Green Cloud Computing » Öko-Institut e.V (2021)